25 Mars 2010 ... 16h48 ...
Juste avant que ta tête fatiguée se pose dans mes mains ouvertes, je regarde la seringue enfoncée dans le catétère scotché à ta patte et je songe malgré moi à ce condamné américain qui a vu de justesse son exécution suspendue cette nuit ....

16h52 ...
Depuis le couloir, je te regarde encore, dans la salle restée ouverte, étalé sur cette table métallique sordide, dans ta dernière position, à plat ventre, la tête légèrement renversée sur son côté gauche

17h00 ...
Un déluge dégringole sur mon pare brise tandis que je regagne mon domicile avec ton collier, qu'on m'a rendu ; je n'ai pas souhaité te récupérer, sous quelque forme que ce soit, mais j'ai souhaité que tu serves à la recherche, puisque nous sommes dans l'enceinte de l'Ecole Nationale Vétérinaire...

18h30 ...
Me voici de retour chez moi, et déjà 3 personnes croisées, à qui j'ai du dire la vérité que je voulais garder un peu pour moi

20h00 ...
Je sors de table, j'ai bu un peu trop ; je vais bien dormir, ou pas, et j'ai peur de demain ..... c'est toujours toi qui me réveillait

De quoi me souviendrai-je, Mon-Pote ?
Des détails d'une journée de fin de vie annoncée ? des premiers signes de ton effondrement, il y a juste une semaine ? de ton dernier regard ? de ta fourrure fauve charbonnée ? de tes oreilles qui avaient la douceur du feutre ? du jour où je t'ai recueilli, presque mourant, dans un petit village des Pyrénées ? des 11 ans qui semblent être passés comme quelques secondes ? de tes courses dans la neige ? du fait de t'avoir emmené enfin en montagne l'an dernier ? de tes gags ? de tes courses après les chats ? de tes léchages de doigts de pieds ? de ce triste épisode en 2004 où tu es resté attaché au milieu d'une forêt pendant 3 jours et 2 nuits parce qu'une ordure voulait se débarrasser de toi à mon insu ? du jour où t'as dégommé le museau d'un chien policier dont le maître prétentieux me disait d'être méfiant ? de tes rapines à table ? tu sais, ce demi reblochon que je n'ai jamais retrouvé, je suis sûr que c'est toi qui l'avais chouravé

21h03 ...
Je termine un blog ; je pense à toi ; je te dis au revoir, mon Toutouchien... je t'ai demandé pardon pendant que le liquide libérateur s'enfonçait en toi.. n'oublie pas de faire une léchouille à mon Papa chéri, que tu croiseras sûrement ....
n'oublie pas de saluer ta copine Yoyo de ma part...qui t'attend depuis 3 ans
Bon, ben voilà .... il faisait déjà froid dans ma vie .... maintenant, il fait vide .... m'en sortirai-je ?

Je t'embrasse sur la truffe, Toutouchien .... on aurait pu sûrement te prolonger d'une semaine ou deux, mais à quoi bon ; hier et avant hier, avant ton malaise de ce matin, inattendu, tu étais de nouveau plein de joie et de patate ; c'est cette image que tu me laisses ...

Merci et bon voyage, Mon-Pote